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Plateforme collaborative d’éducation aux images

Dispositif Collège au cinéma
Dispositif Passeurs d’images

Questions à Wilfried Jude

Entretien avec Wilfried Jude, créateur et animateur des ateliers.

 

Pour vous présenter, quelle est votre expérience dans le domaine de la réalisation de fiction et avec quelle structure travaillez-vous ?

Pour le cinéma, j'ai travaillé sur une diversité de projets : j'ai réalisé une série documentaire il y a trois ans et j'ai également longtemps travaillé pour un autre réalisateur, Gaël Lépingle.  Je faisais les images de certains de ses films. Actuellement, je suis en train d'essayer de faire mon propre projet de film « à la maison ». Pour cet atelier “Le jour d'Après", je me suis associé avec Cinéma 93 et Passeurs d’images en Île-de-France pour le penser et le déposer.

Vous avez donc répondu ensemble à l'appel à projet « Le Jour d’après » lancé par l’association Passeurs d'images dès la fin du premier confinement, en 2020. Qu'est-ce qui vous a donné l'envie de proposer ces ateliers autour de la question du TEMPS, thémtique centrale de la série Docteur Who ?

Effectivement, l’enjeu présent dans la proposition « Le jour d'après » était de permettre une meilleure connaissance des mécanismes de l'écriture sérielle pour pouvoir ensuite s’essayer à la création en atelier à partir de la thématique proposée. Dans la première liste des séries retenues pour constituer le corpus figurait Docteur Who et je l’ai choisi car c'est une série que j'apprécie fortement et qui me paraissait exemplaire par rapport au traitement de la question du temps. J'avais regardé les douze saisons depuis la création de la série en 2005 et trouvé que c'était une vraiment très belle série sur le paradoxe temporel, une histoire mélancolique sur le temps qui passe...

Quelles ont été leurs réactions des collégiens dans les temps d’analyses de cette série ? 

La majorité des élèves ne connaissait pas Docteur Who avant le projet. On leur a montré cinq épisodes et ils en ont choisi deux. Ça les a vite intéressés, l'idée leur plaisait bien. Ils ont bien saisi les caractéristiques des personnages, le rapport du Docteur Who à ses compagnons qui est si central. Ce dernier est en effet est toujours escorté par quelqu'un qu’il a rencontré par hasard, fortuitement et les élèves ont su conserver cette dimension pour l’intégrer dans leur propre création de scénario. Le double épisode qu’ils ont écrit est entièrement inédit, ils ont tout imaginé du début jusqu’à la fin.

Comment les collégiens ont-ils travaillé ensuite en groupe pour l’écriture des scénarios ? Il y a eu deux temps d’écriture, c’est bien cela, un pour créer la suite d’un épisode et un autre pour imaginer une partie d’épisode inédit ? 

Cela s’est passé de la manière suivante : au démarrage de l’atelier, on a divisé la classe en petits groupes. Chacun des groupes a écrit un pitch et il a fallu récupérer les principes intéressants dans chaque pitch proposé. Ensuite sur la base du volontariat, certains d’entre eux sont venus les mercredi après-midi pour écrire les scénarios de deux épisodes. On a rassemblé les idées et on les a ensuite développées. Il a bien sûr fallu aider les participants dans l'écriture, notamment à composer avec la complexité des paradoxes temporels dans cette série, mais ils s’en sont très bien sortis. L'idée, c'était que je leur lance des pistes puis c'était à eux de dénouer les fils. Quand ils étaient bloqués, il suffisait de les rendre conscients des possibilités scénaristiques qu’ils pouvaient suivre, et on continuait en choisissant l’option qui les intéressait le plus.

Cet atelier s’appelle « Le Jour d’après » en référence au confinement et à la crise de la Covid en 2020. Pensez-vous que leur vécu du confinement et qles questions suscitées par cette crise concernant leur avenir les ont inspirés dans l'écriture de leurs épisodes ?

Je pense que c’est bien sûr un effet de l’époque…On n'a rien forcé mais le virus est venu naturellement s’installer dans leur imaginaire et dans leur processus créatif. Le premier épisode qu’ils ont écrit  fait la part belle à l’action et le deuxième est un mélange de flash-backs et de dialogues. Il y a beaucoup de séquences, d'explications dans le prochain ; il sera plus centré sur les détails de l’histoire qu’ils ont imaginée.

Ils ont bénéficié de 50 heures d’atelier et ont été notamment initié aux techniques de découpage de scénario, de tournage et de montage. Comment cela s’est-il organisé ? Quel(s) rôle(s) ont occupé les élèves dans ce processus ?

On a essayé de faire en sorte que les élèves puissent passer à tous les postes : acteurs, assistant à la réalisation, postes techniques pour apprendre le maniement du matériel de tournage… Finalement, on leur a quand même laissé la latitude de choisir le poste qui leur convenait le mieux et ça s'est bien passé. Par contre, tous ont adoré faire le clap. C'est un grand mystère pour moi de constater à quel point les ados adorent faire le clap…

Où leurs réalisations seront-elles projetées ? Au sein du cinéma municipal, du ciné-club du collège ou également ailleurs ? 

Normalement, trois restitutions sont prévues. une première au cinéma l'Écran de Saint-Denis, une seconde au festival Séries Mania et peut-être aussi une troisième au festival Série Séries. Il n'y aura pas de restitution au collège, la projection aura lieu directement en salle. J'attends d’ailleurs une autorisation de la BBC pour pouvoir projeter les épisodes des élèves sur le Dr. Who. Ce qui est sûr, c’est que ça leur fera plaisir de voir sur grand écran tout ce qu’ils ont pu créer et accomplir par eux-mêmes.

Que pourriez-vous dire aujourd’hui, à ce stade, de l’impact de cet atelier d’écriture et de réalisation sur les élèves ? (réponse avec leur professeur Antoine Petitmangin)

Ce qu'on constate, c'est que les élèves adhèrent plutôt bien au projet. On a même eu des remerciements au conseil de classe du premier trimestre, de la part des élèves qui nous ont dit qu’ils trouvaient le projet génial. On a redécouvert certains élèves qui ne sont d’habitude pas très actifs. Certains ont vraiment pris leur place sur le tournage toute la journée, alors qu’ils sont  très discrets. Les autres élèves, ceux qui n'étaient pas acteurs, ont aidé en étant assistant de réalisation et ils étaient au top ! Donc, effectivement, chez certains élèves, ce tournage a apporté un gain de maturité et une prise de confiance. Sur le long terme, c'est quand même un projet lourd pour tout le monde, ça prend beaucoup de temps à leurs professeurs et beaucoup de temps aux élèves. Mais ça en vaut la peine, c’est un plaisir partagé par tous et une expérience qui s’est révélé riche et épanouissante pour la plupart d’entre eux.