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Plateforme collaborative d’éducation aux images

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Dispositif Collège au cinéma

Atelier - Comment organiser un comité de programmation ?

Dans cet atelier d’échanges de pratiques et d'expériences, la question parfois délicate de la programmation des films a été abordée. Comment s’élabore la programmation dans les coordinations ? Comment créer un comité de programmation et de quelle manière l’animer ? Comment établir des critères de sélection et une programmation cohérente ? De quelle manière partager la programmation avec les partenaires du dispositif ? Comment recueillir des retours sur les films proposés ? Comment optimiser l’utilisation des ressources mises à disposition par l’association nationale et le CNC ?
Restitution co-rédigée par Louise Fort et Emilie Drapeau, étudiantes du Master Didactique de l’image (Paris Sorbonne Nouvelle) qui ont également contribué à l’atelier.

Présentation

Alors que le fonctionnement du comité de pilotage est clairement spécifié dans le cahier des charges de Ma Classe au cinéma (édité par le CNC, disponible sur la plateforme de L’Archipel des lucioles), celui du comité de programmation reste assez libre et ne relève pas de l’obligation. C’est aux coordinateur·rice·s du département de mettre en place et de veiller au bon déroulement du comité de programmation. Cette liberté fait naître des questions légitimes auxquelles les participant·e·s de l’atelier ont tenté de trouver des réponses.

Restitution

Après un tour de table, nous relevons les problèmes auxquels les coordinateur·rice·s font face lorsqu’il s’agit de mettre en place le comité de programmation pour les dispositifs École et cinéma et Collège au cinéma. La liste des difficultés s’allonge au fur et à mesure des prises de parole : la sollicitation et l’assiduité des enseignant·e·s, on décèle une confusion entre comité de programmation et comité de pilotage, il est difficile de fixer des règles pour sélectionner des films, les coordinateur·rice·s disposent de trop peu de temps pour décider lors des réunions, tous·tes les participant·e·s du comité ne parviennent pas à connaître l’ensemble des catalogues, la communication avec les enseignants n’est pas toujours fructueuse.
Le groupe liste les différentes questions quand on monte un comité de programmation
sous forme de brainstorming.
Ces observations une fois exprimées, l’intervenante Aurélie Grenard divise le groupe en deux pour faciliter la discussion et répondre aux questions concrètes. Les paragraphes qui suivent forment la somme des solutions proposées par les participant·e·s, mais certaines questions restent encore à explorer.
 

Brainstorming du groupe
Idéalement, quand doit se dérouler le comité de programmation ?

Le comité de programmation doit dans la mesure du possible être dissocié du comité de pilotage pour que les conversations soient possibles et non contraintes par le temps, il s’agit de poser une vraie réflexion autour des films. Les vœux de programmation étant communiqués mi-avril, ce comité devrait se dérouler courant février ou mars au plus tard (le mercredi matin est évoqué). Pour convenir d’une date suffisamment en amont, un outil doodle peut être envoyé dès la fin d’année civile. Même s’il est difficile pour les professeur·e·s de demander à être remplacé·e·s, il est possible d’imaginer que ce comité se tient sur le temps de cours pour que le temps de discussion soit plus long. Idéalement les participant·e·s devraient se retrouver une journée ou une demi-journée.
Il est aussi possible d’imaginer faire plusieurs réunions de quelques heures pendant un trimestre afin d’être sûr·e·s de parcourir toutes les questions que la programmation fait émerger et d’avoir le temps de prendre du recul sur les discussions entre chaque session ou de voir/revoir des films. Ces temps pourraient être programmés en visio-conférence pour ne pas entraîner d’ordre de mission supplémentaire ni de déplacement.
Par ailleurs, pour être certain que les discussions soient fructueuses, il faut s’assurer que les participants aient vu les films (ce qui n’est pas toujours évident). Cela sous-entend qu’il est attendu des participant·e·s un travail personnel en amont des réunions.

Qui est invité à participer au comité ?

Cette question fait écho au manque de représentativité des enseignant·e·s lors des comités de programmation. Les coordinateur·rice·s présent·e·s à cet atelier témoignent envoyer des invitations à tout le réseau des classes inscrites mais ne reçoivent que très peu de réponses.  Il est nécessaire de faire comprendre aux professeur·e·s qu’ils.elles sont légitimes dans les conversations et qu’il ne faut pas nécessairement être à la pointe de la cinéphilie pour être pertinent·e. Leur regard et leur expertise pédagogique importent beaucoup dans le processus de choix des films. Il faut éviter que le comité de programmation devienne un entre-soi de cinéphiles pour que les non-spécialistes y trouvent une véritable place. Il faudrait aussi imaginer pouvoir leur libérer du temps pour regarder les films du catalogue, pour qu’ils et elles se sentent investi·e·s.
Pendant ce temps de réflexion, nous nous accordons pour dire que ce comité ne doit pas dépasser la dizaine de membres pour assurer une bonne circulation de la parole. Une proportion 50/50 des acteurs culturels et du corps enseignant serait idéal, la parité est aussi un critère auquel il faut veiller.
Il est conseillé de convier au comité :

  • Les coordinateur·rice·s de salle de cinéma
  • Un·e formateur·rice EAC académique s’il y en a sur le territoire
  • Les coordinateurs DSDEN, les DAAC, conseiller·ère·s pédagogiques, les enseignant·e·s (ou a minima un·e représentant·e par établissement ou par secteur de salle de cinéma)
  • Les gérant·e·s de salle ou représentant·e·s des syndicats de salles de cinéma qui sont des personnes ressources importantes
  • La place des élèves est aussi questionnée (pour le second degré). Certains départements ont déjà expérimenté l’intégration de classes dans le processus. Participer à la question de la programmation devient alors un but pédagogique en soi.
  • Pour Collège au cinéma, on peut aussi identifier les Référents culturels, normalement il y a une personne référente par établissement. 

Ce que l’on retient de cette tentative de composition du comité c’est qu’il est fondamental de faire rencontrer les salles et le corps enseignant pour que chacun soit sensibilisé aux difficultés des autres.
A noter qu’il est intéressant d’inviter plus particulièrement les enseignant·e·s qui font des retours critiques sur la programmation. Cela permet d’exposer les critiques et d'assurer un engagement de leur part pour porter une proposition. Il est possible d’imaginer repérer ces personnalités engagées lors des séances de prévisionnement de l’année en cours pour le comité de programmation de l’année suivante.
Pour éviter une sur sollicitation de certain·e·s membres, la coordination doit aussi se questionner sur les modalités de renouvellement des participant·e·s.
 

Comment doivent être invités les participants ?

Pour limiter les défections, il vaut mieux essayer de téléphoner aux participant·e·s invité·e·s. Dans la limite du possible contacter directement une personne et non passer par des courriels impersonnels, cela permet de s’assurer de la motivation et alors susciter l’intérêt pour le comité de programmation. Il est nécessaire de prévenir de l’engagement et de l’assiduité que requiert cette mission.

Est-ce qu’un questionnaire en amont du comité doit être envoyé aux partenaires pour préparer les discussions ?

Il est pertinent de vouloir baliser le terrain avant de se rencontrer lors du comité. Proposer aux participant·e·s de remplir un questionnaire permet de jalonner la discussion. Avec cette proposition les critères de sélection seraient à ce stade déjà fixés, le questionnaire permettrait de gagner du temps en évacuant des films (déjà programmés les cinq dernières années, hors thématique, etc), et permettrait de faire ressortir ceux sur lesquels se concentrer.
Il a été question également d’un questionnaire envoyé en amont aux enseignant·e·s pour leur demander des choix de films. Cela permet d’impliquer les enseignant·e·s en dehors du Comité de programmation et de réduire le nombre de films. Toutefois le constat est qu’on se retrouve avec les films les plus connus. Cela ne permet pas d’ouvrir la programmation sur des films du catalogue moins diffusés. On peut imaginer un questionnaire mais avec une pré-sélection de films faite par le Comité de programmation afin d’éviter cet écueil.
 

Comment mener une discussion au sein du comité de sélection ?

Il est important de poser le cadre, les objectifs et les consignes de la discussion, mais aussi de préciser le fonctionnement et les modalités du vote au début de la séance. Un ordre du jour élaboré en collaboration peut être communiqué en amont pour être sûr·e·s que tous et toutes soient d’accord sur le déroulé des échanges.
Dans l’idéal, il faudrait qu’un·e médiateur·rice soit désigné·e pour répartir la parole, vérifier que tout le monde puisse s'exprimer, faire attention à la durée pour que tous les points à l’ordre du jour soient couverts. Il est possible d’imaginer mettre en place des tours de table, couper la parole en cas d'extrême besoin et ne pas oublier d’écouter sans juger. Si un·e animateur·rice est désigné·e uniquement pour organiser la discussion, les participant·e·s auront alors un·e référent·e pour fluidifier les échanges.

Quels sont les critères de sélection qu’il faut fixer ?

Pour cette question, il n’y a pas de véritable réponse tranchée. Il faut voir ce qui fonctionne sur tel ou tel territoire, proposer des pistes de travail. Le rôle du· de la coordinateur·rice est aussi de prendre la décision, même si elle est difficile d’établir des « critères de sélection », une présélection peut faciliter la discussion lors du comité et largement resserrer le nombre de films à visionner. Plusieurs participant·e·s de l’atelier énoncent leur méthodologie pour exclure de fait des films du catalogue : les films programmés lors des 4 dernières années ne sont pas « éligibles » et les nouveaux films des catalogues sont parfois exclus la première année d’intégration pour éviter un refus (nombre de vœux trop important sur le territoire national). Certain·e·s évoquent aussi la nécessité de fixer des critères tels que : varier les genres cinématographiques, trouver des films communs lorsque plusieurs dispositifs sont coordonnés (donc penser l'inter degré) ou des films communs aux différents niveaux (un film dans l’année qui s’adresse aux élèves de la 6ème à la 3ème par exemple pour CAC), inclure des films en version originale sous-titrée, faire apparaître au moins un film de patrimoine et/ou d’animation, de proposer une diversité dans la représentation des personnages à l’écran. Il ne faut pas omettre les critères d’inclusivité et prendre en compte les problématiques liées aux situations de handicaps (durée, versions SME ou audio décrites).
Dans la coordination de Guyane, chaque membre doit venir avec sa proposition de programmation thématique et personnelle pour la défendre auprès des autres, puis toutes sont soumises à un vote. Cela permet de penser en amont le principe de programmation et de lien entre les films plutôt que de passer chaque film en revue. Cela représente donc aussi un gain de temps dans la discussion.
Les enseignant·e·s ont régulièrement la volonté de lier leur matière aux films qui vont être choisis avant de les considérer comme un objet artistique à part entière. Les coordinateur·rice·s expriment que lors des comités, le cinéma est souvent perçu comme un divertissement ou un matériau documentaire illustrant un autre domaine. Depuis l’origine de la création des dispositifs scolaires, nous cherchons à éviter l’instrumentalisation du cinéma comme un simple support pédagogique pour aborder certains sujets. La principale vocation des dispositifs est de tenter d’intéresser les élèves à la forme du cinéma en tant qu’art.

Qu’est-ce qu’une bonne programmation ?

Il n’y a pas de recette toute trouvée pour composer une bonne programmation et il est nécessaire d’avoir conscience que la proposition est singulière et ne plaira jamais à tout le monde. Pour être qualitative elle doit être avant tout pensée, délibérée, justifiée et défendue pour ses intérêts pédagogiques et artistiques.

On comprend la responsabilité, outre pédagogique, de répondre à une demande du corps enseignant qui ne dispose parfois que de trois sorties scolaires annuelles et qui correspondent donc aux trois projections en salle.
 

Faut-il une cohérence entre les films ? Faut-il mettre en place une thématique ?

Imposer un thème peut sembler contraignant si on applique cette idée uniquement au « discours » du film, c’est-à-dire les sujets évoqués. Il est possible de réfléchir à la forme du film, en trouvant un lien entre les films et une « question de cinéma ». Il est possible d’imaginer une programmation qui s’organise par exemple autour du fonctionnement du plan-séquence, de la lumière, du point de vue, du son etc. L’objectif serait de montrer que le cinéma est important en lui-même, par ses formes. Il est possible de se référer au site du Cinéma Cent Ans de Jeunesse qui transmet le cinéma au jeune public à travers des questions de cinéma, une nouvelle chaque année. Par ailleurs, une question de cinéma en tant que fil conducteur entre les films permet de montrer aux enseignant·e·s que le « voir » et le « faire » sont aussi importants que le « lire et écrire ». La programmation peut aussi en ce sens être pensée en fonction des ateliers de pratique qui pourront être mis en place dans l’année. Produire des images n’est pas une affaire de spécialiste et les nouveaux outils (téléphones, tablettes) facilitent la création, il est donc important de ne pas oublier ce volet des dispositifs.
Cependant un thème de fond (sujets de société : l’écologie, la ville, un pays, les héroïnes fortes, etc) peut permettre une ouverture des pistes de réflexion qui rassure et peut trouver des échos au sein des programmes scolaires.
Certaines coordinations expliquent sélectionner jusqu’à cinq films pour que sur un trimestre les enseignant·e·s puissent faire une programmation interne à la programmation départementale. Si cette solution laisse la possibilité d’avoir un impact sur le programme mais il faut cependant noter que pour les salles cette option soulève des problématiques organisationnelles pour le bon déroulé des séances (multiplication des séances pour de petits effectifs).
La programmation doit être également pensée comme un parcours sur l’année.
 

Comment bien prendre connaissance des films du catalogue ?

Plusieurs outils sont disponibles et relayés par la coordination nationale de L’Archipel des lucioles, qui crée des passerelles vers les ressources propres à chaque dispositif. Pour Collège au cinéma les fiches élèves et les dossiers enseignants sont téléchargeables sur Transmettrelecinema.com, pour Ecole et cinéma les Cahiers de notes sont consultables sur inscription gratuite à la plateforme NANOUK et seront bientôt disponibles sur cette même plateforme les ressources Maternelle au cinéma. La frise chronologique sur NANOUK, mise en ligne en novembre 2022 invite à découvrir les films de façon chronologique, accompagnés d’une rapide description des intérêts de celui-ci dans une programmation scolaire et d’un extrait significatif du film pour en comprendre la tonalité. Cet outil est une première entrée en matière avec les films, permet de les situer dans les différents courants cinématographiques et d’avoir des éléments complémentaires à la liste nationale annuelle.
Pour Collège au cinéma, le catalogue mis en place par le CNC permet d’avoir une vision globale du catalogue avec des informations sur les thématiques abordées et des passerelles vers d’autres formes artistiques.
Les participant·e·s font aussi appel à d’autres types de ressources, à savoir : les dossiers de presse disponibles sur les sites des distributeurs et les bandes-annonces.

Comment visionner les films en amont du comité ?

Il est possible de voir les films via des liens Behive, la plateforme d’Hiventy développée grâce au CNC. C’est une solution gratuite et simplifiée qui donne accès à tous les films des catalogues. Les liens sont générés par les coordinations pour les membres du comité, afin que les films soient vus pour être discutés. Sans cette étape fondamentale, les propositions de films ne varient pas beaucoup d’année en année et se répètent pour se diriger vers des films déjà très plébiscités car très connus (Billy Elliot, Kirikou et la sorcière, Mon voisin Totoro, etc). L’utilité de Behive est largement reconnue pour faciliter les visionnages et en assurer le suivi (il est possible de savoir combien de personnes ont ouvert le lien pour voir le film). Cette phase se déroule cependant sur le temps personnel de chacun·e.

Comment se préparer au refus et à la nécessité des films de remplacement ?

Il est possible qu’un film soit refusé à la programmation car le nombre de vœux pour un même film est limité sur l’ensemble du territoire (pour École et Collège un même film peut être programmé par 25 coordinations maximum). Un film de remplacement doit donc être envisagé dans ce cas de figure. Si la programmation est construite autour d’un projet départemental ou d’une thématique, il paraît essentiel que le film de remplacement doit s’inscrire dans la continuité des projets pour ne pas déséquilibrer le programme.

Comment transmettre les choix faits aux enseignant·e·s ? Comment donner du sens à posteriori à la programmation ?

La solution partagée par la majorité des participant·e·s à cet atelier de réflexion est celle de l’édito rédigé puis communiqué sur le territoire, qui expliquerait à la fois comment s’est déroulé la réunion, qui était présent, le thème retenu et enfin de justifier le choix des films avec les argumentaires synthétisés de chacun·e. Dans l’idéal, une personne assisterait au comité pour prendre des notes et rédiger cet édito, c’est pourquoi il a été évoqué la possibilité de mobiliser des étudiants en études cinématographiques ou en médiation culturelle (lorsqu’il y en a dans le département) qui peuvent être intéressé·e·s par cette mission. D’autres formats (vidéo ? podcast ?) pourraient être envisagés. Certaines coordinations réalisent des bande-annonces spécifiques au dispositif pour présenter les films de manière dynamique.
Cette communication serait également à destination des salles. Ce sont elles qui se retrouvent face aux élèves et aux enseignant·e·s, et il faut qu’elles aient des éléments pour parler de la programmation (voir pour la justifier quelque fois).
 

Intervenante
Aurélie Grenard

Coordinatrice Collège au cinéma pour le Puy-de-Dôme (Cinéma Le Rio). 
 

Ressources complémentaires

Conçues et réalisées par Émilie Drapeau, apprentie assistante des programmes d'éducation aux images à L'Archipel des lucioles de 2021 à 2023